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21 avril 2010

L'abbé Jules

Dans son roman Octave Mirbeau donne la parole à Albert, petit garçon de 10 ans dont les parents sont peu bavards : " Mes parents ne se parlaient presque jamais. Non qu'ils se boudassent ; ils s'aimaient beaucoup au contraire, s'entendaient en toutes choses le mieux du monde et l'on ne pouvait rencontrer un ménage plus uni ; mais, habitués à penser la même pensée, à vivre les mêmes impressions, et n'étant point romanesques de leur nature, ils n'avaient rien à se dire "    

Ils auraient pu pourtant parler de l'oncle Jules qui avait attiré l'attention sur lui depuis son enfance turbulente où il multipliait espiègleries et méchancetés envers son entourage. Ce fut une surprise et un soulagement général lorsque Jules demanda à rentrer au séminaire pou devenir prêtre. Hélas ses études bien que brillantes n'assouplirent pas son caractère et dès qu'il fut nommé secrétaire de l'évêque il entra en lutte ouverte contre tous ceux qui avaient vraisemblablement choisi la carrière religieuse pour le confort matériel qu'elle leur apportait et non par idéal de pauvreté et d'abnégation :

" Et sec comme un squelette et sale comme un mendiant, il assistait, la haine au coeur, au fleurissement de ces joues qui suaient la paresse et la gourmandise, à l'épanouissement de ces ventres heureux, voluptueusement tendus sous des soutanes chaudes et des douillettes neuves " Il est donc affecté à une petite cure de montagne où il manque mourir d'ennui : " Je sens qu'il y a en moi des choses refoulées et qui m'étouffent et qui ne peuvent sortir dans l'absurde existence de curé de village à laquelle je suis éternellement condamné... J'en ai assez de porter cette ridicule robe, de faire des simagrées ridicules, de vivre comme un esclave et comme un castrat... " Aussi, dès qu'il peut disposer du petit héritage que lui laisse sa mère en mourant, il abandonne sa cure et file sur Paris où sa famille perd sa trace jusqu'à qu'il décide, 6 ans plus tard, de retourner dans son village. Albert va l'attendre au train : " Et parmi les angles et parmi le noir, sous l'ombre d'un grand chapeau, deux regards étranges, colères, deux regards entre lesquels pointait un nez vorace et quêteur comme celui d'un chien, deux regards insoutenables s'abattaient sur nous. C'était mon oncle "

Dès son arrivée il achète une bastide,( prouvant ainsi qu'il a fait fortune à Paris) où il s'enferme mystérieusement faisant jaser tout le village ;

" On se représentait mon oncle, vêtu ainsi qu'un sorcier évoquer des sortilèges, tandis que ses livres, s'animant d'une vie sabbatique, glissant comme des rats, miaulant comme des chouettes, sautaient comme des crapauds autour de lui " L'oncle Jules, très malade se prend d'affection pour le petit Albert que ses parents lui mettent dans les jambes pour essayer de récupérer un peu de son héritage. Peine perdue le testament de Jules donne sa fortune complète au premier curé qui se défroquera tant il sait par expérience que les fils de paysans ne rentrent dans les ordres que pour échapper à la misère

" Ce testament était le dernier hoquet de cette âme impudente, le dernier rictus de ce démoniaque esprit " 

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