Il faut qu'une porte...

Pourquoi le comte était-il venu voir la Marquise ? Et pourquoi essayait-il à tout moment de sortir de son salon ?

IL faut qu'une porte soit ouvert ou fermée nous dit Alfred de Musset. Il faisait grand froid ce jour-là et le comte ne supportait ni la fraîcheur ni la solitude : " J'étais un peu ennuyé. Je ne sais pas ce que j'ai, c'est un mal à la mode... Je suis sorti par un temps glacé ; je n'ai vu que des nez rouges et des joues violettes. Je ne sais que faire ; je suis bête comme un feuilleton "

jusque là, tout va bien ; la Marquise avoue s'ennuyer elle aussi :

" Il me semble que mon ennui me vient moins de l'air du dehors, tout froid qu'il est, que de celui que les autres respirent. C'est peut-être que nous vieillissons. Je commence à avoir trente ans, et je pers le talent de vivre "

Que faire pour s'occuper ? Si je vous faisais la cour, dit le comte ? Ah non répond la Marquise, quelle est cette manie ridicule de dire aux femmes qu'elles sont jolies pour s'en faire aimer ?

" Vous me trouvez jolie, je suppose et cela vous amuse de m'en faire part... La belle manière de se faire aimer que de se planter devant une femme avec un lorgnon , de la regarder des pieds à la tête, comme une poupée dans un étalage, et de lui dire bien agréablement : " Madame, je vous trouve charmante "... Il faut supposer à une femme une tête bien vide et un, grand fond de sottise, pour se figurer qu'on la charme avec de pareils ingrédients ..."

Voilà le comte tout penaud qui se fait traiter de pauvre comédien et tente maladroitement de défendre cette mauvaise pièce que se jouent les hommes et les femmes depuis la nuit des temps ^

" Si l'amour est une comédie, cette comédie, vieille comme le monde, sifflée ou non est, au bout du compte, ce qu'on a encore trouvé de moins mauvais. Les rôles sont rebattus, j'y consens ; mais si la pièce ne valait rien, tout l'univers ne la saurait pas par coeur..."